Pourquoi les africains ne savent pas accueillir les clients en entreprise?

Publié le par Amine Idriss Adoum

Pourquoi les africains ne savent pas accueillir les clients en entreprise?

S'il y a un sujet d'étonnement dans le monde des entreprises de chez nous, c'est bien celui de l'accueil. En effet, je trouve extraordinaire la différence d'accueil qu'un caissier de banque par exemple peut réserver à ses clients au guichet et à ses visiteurs à la maison. Autant il serait prévenant, à l'écoute et se plierait en quatre pour vous faire plaisir à la maison même si vous êtes un inconnu, autant il est capable de vous envoyer balader si vous vous présentez comme client inconnu à son guichet.

J'ai essayé de trouver quelques explications à ce phénomène étrange, car pourquoi autant de différences et de contradictions entre l'espace du bureau et la maison? S'il est admis qu'il est poli, bien élevé et socialement normal de bien accueillir les gens chez soi à la maison, pourquoi en serait il autrement au bureau?

On peut tenter ici quelques explications. La première viendrait de l'architecture de nos espaces de travail en particulier et de nos espaces publics modernes en général. Ces deux espaces possèdent des configurations qui différentes de celles qu'on trouve dans nos espaces privés. Nos maisons sont organisées pour quelque peu "forcer" l'accueil. La convivialité de l'accueil à domicile est imposée par une architecture fonctionnelle ouverte qui fait de la place à l'étranger.

En plus de cela, les codes culturels et sociaux qui accompagnent et encadrent le rite de l'accueil imposent des postures, des gestes, des paroles et des obligations matérielles qui ont pour but final de lancer la conversation et d'engager les échanges de services, de biens et de moyens. Le caractère convivial et poli de l'accueil à domicile est donc le produit de plusieurs éléments qui se conjuguent au passé, au présent et au futur.

Nos espaces publics sont généralement totalement opposés à nos espaces privés. Ils respirent le béton, complètement armé contre tout affect. Les géométries angulaires des espaces de bureaux en font des lieux de confrontations et non de discussions. Les procédures de gestion des visiteurs, qu'ils soient clients, partenaires ou simples curieux imposent des postures et des attitudes rythmées par le découpage économique du temps et la recherche du gain potentiel amené par la visite. D'autre part, le caissier sait surtout que rien ici ne lui appartient. Pas même son travail puisque le temps de ce travail est la propriété de l'entreprise.

La seconde explication est sociologique. Elle est liée à nos usages du temps. À la maison, nous avons le temps et nous l'utilisons pour un gain social qui n'a pas de prix. Au bureau, le temps a un prix, celui du salaire que nous paye le patron. Le temps du bureau est à usage économique et il n'est pas a gaspiller en salamalecs sans intérêts économique. Mais bien que sachant cela, le petit caissier malin voudra tous les matins utiliser les deux premières heures du patron pour passer ses coups de fils personnels, prendre des nouvelles, en donner, entretenir ses relations sociales, etc.

Si le caissier peut effectivement faire tout cela sans être gêné ni engueulé, à partir de 9 heures il est souriant et le restera probablement toute la journée. Si le patron applique la discipline normale qu'un environnement de travail normé requiert, alors ça sera une journée de bouderies, comme toutes les journées classiques de nos bureaux en Afrique.

Publié dans Economie

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